ZA0 WOU-KI (1921-2013) - 17-4-69 

ZA0 WOU-KI (1921-2013)
17-4-69 

1969
Huile sur toile
Signé en bas à droite
Contresigné et daté au dos
46 x 54 cm

Zao Wou-Ki nait en 1920 à Pékin et passe son enfance à Nantong près de Shangaï.

Déjà sensibilisé au dessin, à la peinture et à la calligraphie, Zao Wou-Ki intègre en 1935 l’Ecole des Beaux-Arts de Hangzhou dont il sera diplômé en 1941. Voulant se défaire d’une tradition qui l’oppresse, il tente de trouver dans la peinture occidentale et dans la pratique de la peinture à l’huile une émancipation. Devenu professeur, il collecte coupures de magazines tels que Life ou Harper’s Bazar reproduisant les œuvres de Cézanne, Matisse ou Picasso.

En 1948, sur les conseils du diplomate Vadime Elisseeff il part pour Paris, s’installe à Montparnasse et intègre l’Académie de la Grande-Chaumière. Il côtoie Sam Francis, Joan Mitchell, Hans Hartung ou encore Pierre Soulages.

En 1954 il quitte la figuration pour se tourner vers l’abstraction. Ainsi, progressivement, la figuration naïve des premières œuvres tend vers des formes simplifiées, puis des lignes noires qui en 1954 deviennent des signes inspirés des inscriptions gravées dans les bronzes chinois de la période archaïque. En 1957, Zao Wou- Ki abandonne ces signes pour ne conserver que des « zébrures, déchirures, balafres ou sutures n’ayant d’autre fonction que de mettre l’espace en tension. ». Enfin, il ne restera que des « traces et des taches » (Guitemie Maldonado, « L’espace dans la peinture : Zao Wou-Ki et les enjeux de l’abstraction après la Seconde Guerre mondiale », dans Zao Wou-Ki, cat. expo., Galerie nationale du Jeu de Paume, Paris, 2003).

Ce processus d’épure ouvre la voie, dès les années soixante, à une recherche permanente de « l’espace et de la lumière » (Sophie Join- Lambert, Zao Wou-Ki, exposition, Musée des beaux-arts de Tours, 1er décembre 1990-14 février 1991. Tours, Musée des beaux-arts, 1990).

L’Hommage à Varèse, peint en 1964, est un jalon important et ouvre la voie à des peintures telles que 17-4-69.

Notre œuvre, réalisée en 1969, illustre bien cette recherche de l’espace et de la lumière.
Rejetant l’idée de paysage pour lui préférer celle de nature, Zao Wou-Ki explore à travers celle- ci les liens et interactions entre son intériorité et un « univers plus large [où] de multiples espaces enchevêtrés prennent un sens cosmique où circulent l’air, le souffle du vent... » (Zao Wou- Ki, Autoportrait, Paris, Fayard, 1988, p. 81).

Ce sont cette circulation, cet enchevêtrement que nous retrouvons dans notre tableau.

Les vides en bas et en haut, échos lointains de la peinturetraditionnellechinoiseetdelatechnique de liubai (« laisser des blancs »), viennent nourrir et se fondre avec le centre.

Ces vides, comme un silence en musique, viennent donner toute leur force aux touches qui se concentrent dans la partie médiane de la toile.

Zao Wou-Ki crée ainsi un espace qui irradie comme un « monde cosmique [fait] de mélange, de brassage d’espace et de silence ». Il crée ici un univers plus large dont le point de départ se trouve au centre de la toile à partir duquel se déploie un espace tout en fluidité.

C’est autour de ce point central que se rassemblent dans un premier temps les touches anguleuses, faites de lignes fines et puissantes ou de sgraffito dans des tons noirs et blancs.

Le geste prend ensuite de l’ampleur dans des touches larges, noires et nacrées, pour devenir enfin ces espaces de silence (en haut et en bas) faits de larges brossages.

Ces plages de repos pictural permettent à cet univers créé sur la toile de se prolonger dans l’espace qui l’entoure.

Cette vocation de la peinture de Zao Wou-Ki s’illustre aussi parfaitement dans la perméabilité des couleurs, qui se fondent les unes dans les autres dans des jeux savants d’estompe, de mélange ou de recouvrement. La perméabilité ainsi créée procure à l’espace à la fois son unité mais aussi son caractère indéterminé et illimité.