CHU TEH-CHUN (1920-2014)

CHU TEH-CHUN (1920-2014)
Des reflets, 1989
Huile sur toile
Signé et daté en bas à droite
Contresigné, titré et daté au dos 
81 x 100 cm


CHU TEH-CHUN (1920-2014)
Lueurs, 1989
Huile sur toile
Signé et daté en bas à droite
Contresigné, titré et daté au dos 
100 x 73 cm
Un certificat d'authenticité de la Fondation Chu Teh-Chun établi par Ching-Chao CHU le 21/10/2022 sera remis à l'acquéreur.

 

Né en 1920 en Chine dans la Province du Jiangsu, Chu Teh-Chun grandit dans une famille de médecins amateurs et collectionneurs de peinture traditionnelle chinoise.

C’est ainsi qu’à la fin de ses études de lycée, en 1935, il entre à l’école des Beaux-Arts de Hangzhou dirigée par Lin Fengmian (1900-1991). Il travaille alors frénétiquement à se perfectionner dans l’expression de cet héritage pictural qu’il affectionne tant.

En 1936, ce sont ainsi plus de cinq cents aquarelles qu’il réalise d’après les paysages du lac de l’Ouest.
Le jeune artiste doit rapidement renoncer à la peinture traditionnelle, l’école de Hangzhou ne proposant pas de formation dans ce domaine. Il se dirige alors vers l’étude de la peinture occidentale sous l’influence de Lin Fengmian.

De 1937 à 1941 le parcours de Chu Teh-Chun est marqué par le conflit sino- japonais (1937-1945). Son école est obligée de déménager à diverses reprises. Toutefois, c’est l’occasion pour le peintre de se délecter de la diversité et de la beauté des paysages qu’il traverse et qui marqueront tout son art.

Il est finalement diplômé en 1941, et l’excellence de son parcours académique lui vaut une place immédiate de professeur assistant dans son école, poste qu’il occupera jusqu’en 1944.

A partir de cette date, et jusqu’en 1955, il aura divers postes d’enseignant, de Taipei à Taiwan et participera à de nombreuses expositions.

L’année 1955 marque un tournant important dans sa carrière. Chu Tech-Chun quitte en effet son pays pour l’Europe. Arrivé à Paris, il se rend immédiatement au Louvre et se retrouve immergé dans l’effusion artistique qui animait alors la capitale autour d’expositions d’artistes comme Dubuffet, Calder, Duchamp, Vasarely, Buffet... En Espagne, il est frappé par l’œuvre de Goya au Prado tandis que la peinture du Greco à Tolède est un choc. Au musée du Jeu de Paume il est émerveillé par Cézanne dont il retient avec intérêt les leçons de construction.

Mais c’est surtout l’exposition de Nicolas de Staël l’année suivante au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris qui est une révélation. Chu Teh-Chun interroge alors son art par le prisme de la non figuration. Il présente ainsi dès 1957 une toile non- figurative au Salon Comparaisons.

Un autre évènement important pour l’évolution picturale de Chu Teh-Chun a lieu à la fin de l’année 1969 lorsqu’il se rend à Amsterdam pour l’exposition du tricentenaire de Rembrandt dont le travail du mouvement, de la perspective et de la lumière l’impressionnera et aura un impact important sur sa peinture.

En 1983, il se rend en Chine ; c’est l’occasion pour lui d’un périple de trois semaines avec son ami et peintre Ladislas Kijno. Il redécouvre avec émerveillement ces paysages qu’il avait arpentés vingt- huit ans plus tôt et retrouve « l’impression bouleversante de renaître à la lumière, à la couleur, à l’atmosphère changeante de son pays, et de revoir à travers la nature les paysages de ses tableaux. » (Pierre Cabanne, Chu Teh-Chun, Paris, Cercled’Art éd., 1993). En 1986, il revient dans son pays pour deux expositions, les premières dans son pays natal, à Taipei et Hong-Kong.

Les deux œuvres présentées ici ont été réalisées en 1989, trois ans après ce deuxième voyage. Exemplaire de l’art de Chu Teh-Chun, elles donnent à voir un espace personnel nourri successivement par les peintres et les paysages chinois autant que par l’art occidental, de Rembrandt à Nicolas de Staël.

Dans ces deux tableaux, tout tend au mouvement qui est à la fois celui de l’air, de l’atmosphère, de la lumière et celui de la manifestation intérieure provoquée par cette vision. La composition s’organise ici dans des contrastes forts et des points de fuite divers qui viennent créer un espace en effervescence sur la toile. Contrastes harmonieux entre tonalités et gestes du peintre.

Les touches précises et épaisses côtoient une apposition plus floue et délayée de la matière héritée de la peinture et de la calligraphie chinoises. Les tons de jaune doré, d’ocre ou de brun d’automne se

juxtaposent, s’opposent à des bleus et des noirs profonds, jusqu’à, parfois se fondre en eux.
Des reflets est ainsi travaillé dans de larges brossages horizontaux au centre desquels des tons ocres et jaunes animés de noir génèrent au fond éthéré une profondeur infinie.

Dans la partie supérieure les touches précises et vives se dressent comme une vision impressionnante et majestueuse, à l’image d’une montagne, pleine de force et de puissance tandis que le reflet inférieur est traité en touches larges et imprécises qui revêtent le calme et la douceur apaisante du miroir de l’eau.

Dans Lueurs, les tonalités s’inversent. Si dans Des reflets l’impression donnée est celle d’un espace dans lequel pénétrer, dans Lueurs Chu Teh-Chun nous donne à voir un mouvement qui vient vers nous, comme une poussée interne prête à submerger l’espace extérieur. Ici les ocres sont sous-jacents et les bleus et noirs viennent s’y poser.

Il reste une percée lumineuse, une lueur dont on devine qu’elle n’est pas engloutie mais en revanche prête à surgir de ces bleus et noirs.

Chu Teh-Chun ne peint pas seulement des phénomènes naturels imperceptibles, comme l’air ou l’atmosphère, mais l’expérience fugace et éphémère que ces visions provoquent en lui. Des reflets et Lueurs viennent illustrer les propos de l’artiste et son incessante quête artistique : « L’abstrait est resté pour moi le langage essentiel qui se transforme et s’enrichit indéfiniment pour communiquer l’expérience et la contemplation vécues ».